La fièvre de l'ouverture.

Quand arrive le 15 août, les conversations entre chasseurs prennent une tournure différente. Que ce soit pour le gibier d'eau, l'ouverture des battues ou tout simplement l'ouverture générale du petit gibier, Chacun développe sa fièvre et se soigne en préparant le matériel, en allant faire une petite reconnaissance sur le terrain ou en passant des heures au téléphone avec les potes pour mettre sur pieds les plans d'attaque.

Cette période de pré-ouverture me remet en mémoire ce qu'était cette fièvre quand n'étant qu'un minot je voyait mon père être atteint de cette maladie chronique. A cette époque, je parle des années 50 et 60, l'ouverture générale du petit gibier se faisait traditionnellement le dernier dimanche d'août, c'est à dire trois semaines plus tôt qu'aujourd'hui. Au début du mois c'était le passage chez l'assureur et à la mairie pour faire valider le permis, puis au siège de la société de chasse pour prendre la carte annuelle.

Le paternel faisait dans les jours suivants sa revue de matos; grand dégraissage du fusil, inventaire des cartouches restantes de la saison précédente, puis fabrication de celles qui manquaient. La poudre, le plomb, les bourres, les cartons, les douilles, tout ça avait été acheté chez Gatimel lors d'une de ces journées de shopping à Marseille que ma mère et ma grand-mère faisaient mensuellement, car à l'époque les grandes surfaces n'existaient pas. L'huile le savon, les tissus et pas mal d'autres denrées s'achetaient en gros à Marseille. Elles revenaient chargées comme des mules et les munitions en kit faisaient partie du chargement. Aller et retour en train bien entendu puisqu'on ne le payait pas étant familles cheminotes.

La fabrication des cartouches était un grand moment, généralement Julien un ami de mon père était là et tout en chargeant et sertissant ils tiraient des plans sur la comète pour le déroulement de l'ouverture. Dans ces années là le sujet principal de la discussion était malheureusement la myxomatose qui quelques années plus tôt avait décimé tous les lapins. Pour la présence des tourterelles la question ne se posait pas vu la date d'ouverture, époque bénie.

Puis les choses sérieuses étaient évoquées: Quel quartier allaient ils faire en premier? Mau casteù ou Couvent ? Petit Cabasse ou Belleval ? Chaque année la question se posait et chaque année la réponse était la même, ils attaquaient par Couvent car ils pouvaient y aller à pieds, les chiens en laisse, dix minutes de marche par la rue Arphon Bruno pour mon père, il prenait Julien au passage et ils étaient sur le terrain.

Ce problème réglé, on passait au casse croute: qui apportait quoi ? Tomates, omelette, cochonnailles, pain, fromage... et bien sur, la boisson; vin ou bière? Et chaque année le même dilemme,
-le vin s'il fait chaud, après on peut plus marcher,
-la bière oui, mais il faut la garder au frais.
C'était généralement une bouteille de chaque qui finissaient dans l'eau fraiche de la vasque de la source du domaine de Couvent, planquées entre les pieds des bambous, elles y passaient la matinée et les bouchons sautaient entre midi et treize heures. Ils cassaient la croute au bord du bassin, les pieds dans l'eau fraiche, les chiens ayant bu dormaient à l'ombre et les chasseurs rassasiés faisaient eux aussi une bonne sieste laissant passer le gros de la chaleur avant de repartir chasser une paire d'heure. Les journées étaient longues car l'heure légale était le lever du soleil et comme l'heure d'été n'existait pas encore on attaquait à 5h30, la nuit tombait à 18h30. Hommes et chiens rentraient fracassés.

Voila, tout était simple, l'ouverture bredouille était assez rare malgré la raréfaction du lapin, les tourterelles, perdreaux et parfois cailles permettaient de varier le tableau, bien que le lapin était alors le gibier recherché avant tout.

Je regarderai ce beau récit demain pour me remettre d'humeur quand je rentrerai du boulot ! En tout cas, j'ai lu les deux premiers paragraphes, j'ai hâte de lire tout ça!

Très beau récit Dédé, qui ma fait remonter les souvenirs d'enfance avec les rechargements de mon grand père et de mon père.Et les longues veillées ou les discutions tournées toujours autour du même sujet.......et moi minot qui buvais les histoires ( plus ou moins romancés ) merci Dédé.

Bonjour a tous

Beau récit qui nous fait remonté dans le temps

Lorsque je l ai lu il m est revenu a l esprit le roman de Marcel Pagnol "La gloire de mon père"

Dédé13

A bientot Grive57

Merci pour ce beau récit Dédé.Depuis quelques jours l'impatience de l'ouverture est de plus en plus grandissante.J'ai envie de refaire le point sur les cartouches mais j'attends debut Septembre car pou l'instant le 12 c'est encore loin.C'est dans ces moments qu'on se rend compte que la passion est intacte,en etant impatients comme des gosses à l'approche de Noel.Pourvu que ça dure!!!!

C'était tout à fait ça,Dédé13.
En Normandie,on ouvrait le 1er dimanche de septembre,mais la température était également torride,les cailles et tourterelles présentes(avec encore quelques râles des genets).
Nous faisions l'ouverture à deux,sur une chasse de 200ha que mon père m'avait louée,pour me récompenser de mes résultats scolaires(en principe,car il adorait aussi déguster du gibier).les lièvres ne se tiraient qu'en fin de chasse(pour éviter d'avoir 4kg dans le dos)et ,quand nous en avions tué un,nous faisions bien dépasser la tête et les pattes de part et d'autre du carnier dorsal de nos gilets.Heureuse époque!Le remembrement commençait tout juste,les champs couvraient de un à dix hectares,les cultures variées laissaient des couverts jusqu'à fin octobre et le gibier abondait (bien que les vieux se plaignaient déjà de sa raréfaction)
A l'époque,les cartouches toutes faites coutaient une fortune:environ 1,5 euro!

Tres beau récit Dédé ,et quelle époque bénie pour le petit gibier !
Et tu fais monter la pression pour beaucoup d 'entre nous ...

Chez nous le lièvre était absent en garrigues, pour en tirer un il fallait aller dans la Crau, mais en août il n'y avait pas beaucoup de courageux pour chasser par +30° dans ce désert de pierres.

joli récit qui rapelle quelques souvenirs de veille d'ouverture!

Joli récit Dédé ! J'ai commencer mon inventaire sur les munitions, mais j'ai pas fini ...

super récit dédé!!!
et je m aperçois, qu avec mes 20 ans de moins que toi, j ai vécu les mèmes émotions de pré ouverture,
avec LE moment le plus attendu de ces préparatifs, c était de pouvoir enfin touché le "graal", en effet, mon père m autorisé de prendre , et d épauler son arme, ( un calibre 16 darne )!!
un vrai moment de bonheur et d émotion pour moi, et encore aujourdhui, a ce moment ou j écris .....
pppooouuuuuu que de souvenir .........

Beau recit Dede ! Ca m a fait remonter un paquets de souvenirs de ma prime jeunesse , merci !

trés beau récit et j'ai toujours cette fièvre lol

ulricka47 a écrit:

trés beau récit et j'ai toujours cette fièvre lol

je crois que sur ce forum, nous l avons tous, et c est tant mieux, c est tellement bon !!!

L'ouverture ne me fait plus grand chose personnelement, j'attend surtout les premières gelées de novembre avec le vent d'est qui va bien, ça sa me travail!!

oui joli recit !
Nous ce n'était pas la même région (le Loiret) mais les méthodes étaient similaires, le père ne pouvait pas chasser sans son pôte Georges
et la bouteille d'eau c'était uniquement pour les chiens
j'ai commencé a le suivre dès mes 12 ans et maintenant je peux rater une ouverture sans problème car ce ne sont plus les mêmes

Et oui , on peut dire que c'était la plus belle chose de l'année ...Maintenant , l'émotion de l'ouverture est partie , chasser 10 mois de l'année , quand vient l'heure de l'ouverture générale , c'est comme les autres jours ...

Ah!les perdreaux nous partaient dans les bottes et les lièvres aussi (aujourd'hui,à l'ouverture ils décollent à 200m).On levait une compagnie,on comptait bien le nombre d'oiseaux,on la faisait voler trois fois en la dirigeant vers un couvert (betteraves ou luzerne-le top-).
Et là,on se régalait,en prenant bien soin de faire ce que les vieux nous avaient enseigné:préserver "la graine"(1/3 de la compagnie plus un autre 1/3 pour la prédation et les morts de l'hiver)

C'est vrai qu'avec l'age ma génération ne vit plus sa passion de la même manière que celle de mon père. Durant 20 ans j'ai raté l'ouverture un an sur deux à cause du boulot, je n'en faisais pas une déprime, malgré qu'étant en Angleterre je voyais du gibier en pagaille.

Voir beaucoup de petit gibier et ne pouvoir faire l 'ouverture ,j 'en connais qui auraient pété un plomb !

Malgré l'age et les années qui passent je ne peux pas imaginer ne pas faire l'ouverture.Ca reste un des meilleurs moments de l'année et je n'imagine pas faire autre chose le 12 Septembre.Je sais que je vais mal dormir et que je serais debout bien avant que le reveil ne sonne.Malgre les ans la passion est toujours là et j'espere pour encore longtemps.

pour moi; presque impossible de dormir; le jour de l'ouverture
malgré les années; je ne pense plus qu'a ça

Bon, alors, cette fièvre de l'ouverture ? Le petit gibier ne semble pas faire recette. C'est vrai que nous sommes de plus en plus nombreux à nous intéresser au grand gibier et pour certains d'entre nous l'ouverture est faite depuis le premier juin, sans parler des amateurs de gibier d'eau qui chassent depuis trois semaines. Les choses ont bien changé.

Je suis de tout coeur avec ceux qui vont maintenir la tradition ,aujourd'hui.Surtout racontez nous ça

Pour nous,la plaine ce sera le 25.J'ai pris une nouvelle chasse de petit gibier cette année.Pour les chiennes!

T’inquiète pas dédé, j'ai pas fermer les yeux de la nuit, juste 1h.. A 6h j'étais a mon poste, heureux, impatient, plein d'espoir..